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Entrevue pour "Noz Pagan Fanzine", (Belgique)

1)Hail Myrkhaal ! Tout d'abord félicitations pour ce nouvel album ! Es-tu déjà au courant des diverses réactions suite à sa sortie au Québec et ailleurs ?

Salutations. C'est encore un peu tôt pour les réactions, mais celles que nous avons déjà eues sont en général très bonnes. Ceux qui connaissaient le groupe auparavant ont été surpris par la violence de nos nouvelles compos et la rapidité à laquelle notre nouveau batteur peut jouer. Je pense que ceux qui avaient des doutes quant à ce que nous allions faire sur un label comme Holy Records vont devoir se la fermer quand ils entendront Hantises !

2) Vous êtes maintenant sur le label français Holy Records. Pourquoi avoir choisi ce label qui n'est pas à proprement parler un label Black Metal ? Est-ce parce que vous vouliez traiter avec des gens dont le sérieux est reconnu ? Etre par ailleurs LE groupe Black Metal du label ?

Je pense que c'est un peu des deux. Quand nous avons envoyé un promo de trois titres à certains labels en 2002, Philippe de Holy Records a été très enthousiaste par rapport à ce que nous faisions, et il nous a proposé un bon contrat. Nous avons aussi été approchés par des labels plus axés sur le Black Metal, mais nous sommes allés avec ce qui nous convenait le mieux en faisant abstraction du style du label. Pour nous, il importait de travailler avec des gens sérieux qui allaient nous permettre de bénéficier d'une bonne distribution, question de pouvoir propager notre peste. Bien entendu, quelques imbéciles nous ont traités de vendus parce que nous avions signé sur un label dont les groupes sont beaucoup plus accessibles, mais cela ne veut aucunement dire que nous avions à changer notre style. De toutes façons, c'est la musique d'un groupe qui fait s'il est commercial ou non, PAS son label. Si un groupe passe à une plus grosse étiquette mais qu'il continue d'être fidèle à son style, il devient soudainement commercial ? C'est de la foutaise tout ça ! Si j'applique la même logique, Dimmu Borgir serait un groupe underground s'il avait sorti les mêmes albums, mais en restant sur No Colours. Ça ne tient tout simplement pas debout. Il y a aussi certainement des avantages à être le mouton noir sur Holy, le groupe qui ne cadre pas avec les autres, comparativement au 10e groupe de Black sur le label X.

3) Comment cela se fait-il qu 'il aura fallu attendre si longtemps pour avoir des nouvelles du groupe ? Avez-vous eu un passage à vide, l'envie de prendre du recul ? A première vue, l'envie de revenir en force est en tout cas présente.

Si nous avons été silencieux pendant aussi longtemps, c'est uniquement pour des raisons de « line-up ». Quand nous avons recommencé à composer après « Dans les Bras des Immortels », nous nous sommes vite rendu compte que nous nouveaux titres étaient encore plus rapides et techniques, surtout en ce qui concerne la batterie. Namtar était déjà à la batterie par défaut, notre première tentative d'acquérir un batteur s'étant révélé infructueuse, mais il lui aurait fallu passer beaucoup d'heures sur cet instrument pour s'améliorer en fonction des nouveaux titres, et il n'avait tout simplement pas le temps nécessaire. Nous avons donc conclu qu'il serait mieux pour le groupe qu'il se consacre uniquement à la guitare et à la basse, même si nous savions que dénicher un batteur assez bon pour jouer nos nouveaux titres n'allait pas être facile. Il nous a fallu deux ans avant de trouver Melkor, mais durant ce temps nous avons continué à pratiquer et à composer. Ensuite, il nous a fallu encore un bon deux ans pour nous habituer à jouer avec lui, enregistrer notre promo, négocier avec divers labels pour obtenir un contrat et finalement enregistrer ce foutu album ! Nous avons bien eu quelques moments de découragement, mais jamais l'idée ne nous a effleuré l'esprit d'en finir avec Frozen Shadows. Je pense avec le recul que l'attente valait la peine, car le groupe est aujourd'hui beaucoup plus solide. Disons que nous ne prévoyons pas un autre cinq ans avant le prochain album !

4) Sur l'album « dans les bras des immortels », on pouvait lire sur le livret que cet album était dédié aux amants de la langue de Molière, est-ce important encore aujourd'hui d'utiliser le français pour les textes de certaines compos ? Comment est-ce perçu dans les pays non francophones ? Que penses-tu des groupes qui utilisent l'anglais de façon superficielle et insipide pour écrire leurs textes ?

C'est encore aussi important pour nous d'avoir des textes en français et de donner à nos albums des titres dans la langue de Molière. Si nous ne l'avons pas mentionné sur Hantises, c'est tout simplement que nous ne voulions pas nous répéter. Comme nous venons du Québec et que nous sommes entourés d'anglophones, la survie de notre culture et de notre langue est un combat quotidien, que nous saluons comme nous le pouvons. Nous utilisons cependant aussi l'anglais pour que les non-francophones soient à même de saisir notre message. Pour ce qui est des réactions de ces derniers, elles sont en général très bonnes, et ceux qui ne connaissent rien au français disent souvent que les textes semblent très mystérieux. Les pires réactions ont été, je te le donne en mille, au Canada ! Bien entendu, nos chers « compatriotes » anglais ne voient en général pas d'un bon oil le fait de nous voir nous réclamer de cette culture qu'ils tentent d'étouffer depuis bientôt 250 ans mais qui refuse de rendre les armes. Ce n'est un secret pour personne que nous sommes des séparatistes purs et durs, alors bien entendu le reste du Canada n'aime pas trop. Pour ce qui est de l'utilisation banale de l'anglais, je se saurais être plus d'accord avec toi. Je ne sais pas pourquoi beaucoup de groupes s'imaginent que c'est bien de redire sans cesse les mêmes clichés sans chercher à explorer un peu plus ces avenues, mais c'est pour ma part quelque-chose que je me refuse à faire.

5) Sur le dernier album, il y a une certaine puissance que le groupe n'avait pas auparavant et ce, en partie grâce à votre nouveau batteur ? Présente-nous le un peu, son parcours.

Effectivement, l'arrivé de Melkor dans le groupe nous a permis d'attendre de nouveaux sommets en termes de puissance et de brutalité, par sa rapidité et sa technique hors-pairs. Cela fait plusieurs années qu'il joue de la batterie, mais nous n'en avions jamais entendu parler auparavant parce qu'il ne vient pas de Montréal (la ville que nous habitons) et qu'il n'avait pas joué dans des groupes très connus, si ce n'est de Decayed Remains (RIP) qui était un peu plus connu. C'est quand il est venu à Montréal pour aller étudier la batterie à l'université et qu'il a appris que nous étions à la recherche d'un batteur capable de jouer un Black très exigeant qu'il nous a contactés pour nous dire que le poste l'intéressait. Dès la première écoute, nous avons su que nous avions trouvé notre quatrième membre ! En plus de Decayed Remains, il a aussi joué pour The Syre, un projet Black de studio auquel il participe toujours.

6) C'est frappant, on a l'impression qu'au Québec comme en Europe, il y a de plus en plus de groupes qui revendiquent leur identité, leur attachement à leur terre. Quel est l'origine, les facteurs de cette prise de conscience à ton avis ?

Je ne saurais parler pour les groupes venant des autres pays, mais c'est certain qu'au Québec cette revendication découle du climat social. Même si nous sommes plutôt du genre à faire nos trucs dans notre coin sans nous soucier de ce qui nous entoure, il est presque impossible pour un Québécois de ne pas se laisser prendre au jeu de l'identité. Après tout, nous avions avant notre propre pays, qui a été envahi par les Anglais (et abandonné par la France, il faut bien le dire.) et annexé de force au Canada. Depuis, il y a eu quelques révoltes, et deux référendums sur la séparation depuis 1980. Il faut savoir que c'est uniquement en menant une campagne de peur et en prédisant une catastrophe économique que le Canada a pu éviter que les Québécois ne se séparent. Par exemple, le referendum de 1995 a été perdu par 1 % (49,5 % pour et 50,5 % contre), et quand on sait que les 85 % de francophones ont voté à 62 % pour le Oui et que les 15 % restant (anglophones et immigrants) ont voté à 95 % pour le Non, il y a de quoi s'enrager ! La seule chose qui retient un bon nombre de Québécois au Canada, c'est la peur de manquer d'argent si le Québec se sépare, parce que si tu demandes à un Québécois francophone ce qu'il pense du Canada, il te répondra qu'il n'en a rien à cirer dans 99 % des cas. Donc, c'est tout ce qu'il y a de plus naturel pour un Québécois de se réclamer de son identité et de la mettre en opposition avec l'identité canadienne, et ceux qui disent que le Québec n'a aucun droit de demander sa séparation ne connaissent pas assez bien son histoire.

7) Le froid, la glace, le vent, . tous ces éléments avaient une part importante dans le concept du groupe, sans doute à mettre en corrélation avec votre environnement, votre lieu d'habitation je pense ? Aujourd'hui, les textes s'orientent en dehors de ces thèmes. Peux-tu nous expliquer l'origine de ce changement ?

Il est évident que notre environnement a beaucoup influencé le groupe à ses débuts. Il faut savoir que le Québec connaît des hivers très rigoureux, encore plus que ceux qui sévissent en général en Scandinavie. Nous avons par exemple eu une (petite) tempête de neige il y a deux semaines: 15 centimètres sont tombés en quelques heures à une température moyenne de -12 degrés celsius. Nous étions. le 3 avril. Tu peux donc imaginer nos nuits de janvier ! Si mes textes sur Hantises sont moins axés sur l'hiver c'est que j'ai voulu coller au concept de l'album qui est beaucoup plus psychologique et qui se veut le reflet de ce qui torture nos âmes. Nous voulions quelque chose de plus personnel cette fois, un genre de défoulement. Je ne pense pas que c'est en parlant de la neige que nous aurions bien rendu ce concept, il nous fallait quelque chose de beaucoup plus tourmenté et violent.

8) Pourquoi avoir ressorti votre démo « Empires de glace » ? Est-ce une idée du label ?

La réédition d'Empires de Glace est effectivement une idée de Holy, mais nous sommes 100 % en accord avec celle-ci. Quand Philippe nous a approché en disant qu'il voulait faire quelque chose de spécial pour la sortie du premier album de Black sur le label et qu'il a avancé l'idée d'une édition double limitée, nous avons tout de suite dit oui parce que ce qu'il proposait n'avait rien à voir avec un truc pour faire de l'argent. En effet, il proposait d'absorber tous les frais supplémentaires reliés à un remastering et à l'impression de deux CDs au lieu d'un, et d'offrir l'édition limitée au même prix que l'édition normale, ce qui revenait à dire que l'édition limitée allait être moins rentable pour lui. Dans ces conditions, je vois mal pourquoi nous lui aurions dit non, surtout si l'on considère que Empires de Glace était écoulé depuis longtemps et qu'il y avait encore beaucoup de demande pour une nouvelle édition.

9) Maintenant que Frozen Shadows est signé sur un label plus ou moins important, verra-t-on le groupe dans des tournées importantes ? Aimez-vous jouer live ?

Frozen Shadows n'a jamais joué live ! Aux débuts du groupe, nous ne voulions absolument pas faire de spectacles, mais dernièrement nous avons commencé à y penser. Nous allons recruter deux « session members » pour la scène (basse et claviers), et si tout va bien nous allons commencer à faire quelques spectacles vers la fin 2004, mais jamais trop. À vrai dire, nous sommes venus à un cheveu de venir faire une mini-tournée en Europe pour novembre 2004, mais le projet est tombé à l'eau à cause des frais de transports trop élevés. On verra bien si quelque-chose d'autre peut se concrétiser plus tard.

10) j'aimerais avoir votre opinion sur quelques points :

a) Le revival raw / primitif à la Darkthrone, Hellhammer (Akitsa, Vargsang,.)

J'adore les groupes raw et primitifs, alors tant mieux s'il y a un retour du style. Cependant, il ne faudrait pas se leurrer : la plupart de ces groupes ne sont pas foutus de faire quoi que ce soit de valable, et ils n'arrivent pas à la cheville des initiateurs du genre. Je trouve qu'il faut écouter ces groupes avec discernement, et dire que c'est automatiquement bon si c'est raw ne me frappe pas comme un exemple d'intelligence. Je connais bien Akista parce qu'ils viennent de notre région, mais personnellement j'aime mieux Vargsang, et surtout Graven.

b) Cradle of Filth - Dimmu Borgir

Veux-tu m'entendre pousser quelques jurons typiquement québécois? J'en ai rien à « crisser » de ces groupes ! Prochaine question.

c) Les Webzines et fanzines et leurs rôles dans la scène.

C'est certains qu'ils jouent un rôle essentiel, surtout pour les groupes plus undergrounds qui ne passeront jamais dans les gros magazines.

d) Le téléchargement des MP3 (répercussion importante pour la scène Black Metal ?)

Là tu vas me faire fâcher ! Si ces foutus MP3 servaient à faire acheter des CDs à ceux qui les apprécient ce serait OK, mais tout le monde sait que ce n'est pas le cas. Quand il ne restera que des gros labels parce que tous les autres auront dû cesser leurs activités parce qu'ils n'arrivent plus à vendre leurs produits, j'imagine que les gens vont se mettre à chialer ? Dites-vous bien une chose : ce ne sont pas les gros groupes qui souffrent du piratage, ce sont les petits ! Nous n'avons jamais été dans Frozen Shadows pour gagner notre vie, mais de là à accepter sans broncher que des gens volent notre Art, il y a une marge.

11) Que penses-tu des tribute album qui germent un peu partout ? Quels groupes reprenez-vous ou aviez-vous repris quand vous étiez plus jeunes lors de répétitions ? Quel est le premier groupe qui t'a décidé à faire du Black Metal

La plupart du temps, les albums tribute sont très ordinaires, parce que les groupes se contentent de copier les versions originales. Nous n'avons pour notre part fait que deux covers depuis que le groupe existe, à savoir Buried by Time and Dust de Mayhem, pour un tribute qui est tombé à l'eau et que nous n'avons jamais enregistré, et Black Spell of Destruction de Burzum, que nous avons enregistré en 2001. C'est une version à la Frozen Shadows, donc très différente de l'original. Je ne vois pas l'intérêt de copier une chanson, et c'est pourquoi nous l'avons vraiment adapté à notre style. Mes premiers pas dans l'univers du Black sont survenus lors de l'écoute des premiers albums de Bathory dans les années 80, alors je te citerais ce groupe comme première influence.

12) Vous jouez du Black Metal depuis 1996, quel regard portez-vous sur la scène au Québec actuellement ? Frozen Shadows est-il fait pour durer puisque c'est votre passion ?

Je ne vois pas pour le moment de fin à Frozen Shadows, puisque c'est effectivement une passion avant d'être une obligation. Bien entendu, le jour arrivera certainement ou le groupe cessera d'exister pour une raison ou une autre, mais ce n'est pas quelque chose qui me préoccupe. J'ai d'ailleurs eu deux groupes avant Frozen Shadows, le premier datant de 1991. Pour ce qui est de la scène au Québec, elle est très diversifiée dans tous les styles de Metal. Pour ce qui est du Black, elle est malheureusement très peu radicale et axée sur les groupes plus commerciaux.